Quel taux de rémission après 4 antidépresseurs ? Une nouvelle analyse des données de l'étude STAR*D montre des taux plus faible que prévu

Une nouvelle analyse d'une étude "historique" qui évaluait les taux de réponse et de rémission à diverses lignes de traitement dans la dépression, montre que les taux de rémissions seraient malheureusement ... plus faibles que prévu.

La dépression est une maladie complexe et multifactorielle, qui a un impact profond sur la qualité de vie et le bien-être des individus qui en souffrent. Cela va au-delà des seuls symptômes psychologiques et influence divers aspects de leur vie quotidienne (fonctionnement, motivation, capacité à entreprendre, lien social, forme physique, etc.).

L'identification et la reconnaissance des facteurs qui sous-tendent la rémission (définie par le moment ou le patient ne présente plus de symptômes) dépressive sont cruciales pour améliorer les thérapeutiques proposées.

Compte tenu de la complexité inhérente de la pathogenèse de la dépression, une approche intégrative et multidimensionnelle, combinant des avancées technologiques telles que la neuroimagerie, l'épigénétique, la pharmacogénétique et l'évaluation approfondie des profils psychosociaux, offre une voie prometteuse pour déchiffrer les mécanismes sous-jacents de la rémission et de la non-réponse dans la dépression résistante au traitement. 

STAR*D une étude historique


Dans ce contexte, l'étude STAR*D, axée sur l'évaluation de l'efficacité des traitements antidépresseurs chez les patients dépressifs, avait offert une opportunité d'explorer en profondeur les aspects complexes liés à la prise en charge de cette affection. L'étude STAR*D (Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression) a débuté en 1999 et les principaux résultats ont été publiés entre 2006 et 2007. Cette étude, financée par le National Institute of Mental Health (NIMH) aux États-Unis, était une des plus grandes et des plus complètes études sur le traitement de la dépression. Cette étude a mis en avant plusieurs grands principes encore utilisés aujourd'hui :

Aucun Antidépresseur n'est "Meilleur" que les autres : L'étude n'a pas identifié un antidépresseur unique comme étant le plus efficace pour tous les patients. Autrement dit un patient peut répondre à une molécule et pas à une autre, cela a souligné l'importance d'une approche personnalisée et empirique (essai / erreur).


Il existe une réponse cumulative : Avec des traitements successifs, un pourcentage plus élevé de patients peut atteindre la rémission (jusqu'à 67%), même si ce taux diminue avec chaque traitement supplémentaire. Ainsi :

  1. Première Ligne (Citalopram) : Environ 37% des participants ont atteint la rémission avec le citalopram, un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS), en première ligne de traitement.

  2. Deuxième Ligne : Pour les patients n'ayant pas répondu ou n'ayant pas toléré le citalopram, des options de traitement de deuxième ligne étaient disponibles, incluant le passage à un autre antidépresseur ou l'ajout d'un autre médicament au citalopram. Le taux de rémission dans cette étape était d'environ 30%.

  3. Troisième Ligne : Les options de la troisième ligne pour ceux qui n'avaient pas répondu aux traitements précédents comprenaient d'autres combinaisons et changements de médicaments. Le taux de rémission était d'environ 14%.

  4. Quatrième Ligne : Pour la quatrième ligne de traitement, qui comprenait des options telles que la tranylcypromine (un inhibiteur de la monoamine oxydase) ou le mirtazapine plus le venlafaxine, le taux de rémission était d'environ 13%.


Importance du changement de traitement : Lorsqu'un patient ne répondait pas ou ne tolérait pas un médicament, le passage à un autre antidépresseur ou l'ajout d'un autre médicament pouvait être bénéfique.


Traitement Long Terme : L'étude a mis en évidence l'importance du traitement continu, même après l'atteinte de la rémission, pour prévenir les rechutes.


Une réanalyse des résultats de STAR*D


Une analyse critique de ces résultats a été publiée en juillet 2023 dans BMJ Open (Rang IF) souligne certaines lacunes dans la méthodologie adoptée par les investigateurs de l'étude STAR*D, avec - d'après eux - un risque majeur d'avoir surestimé les taux de rémission et de réponse cumulatifs, créant ainsi une distorsion de la réalité dans leur article de synthèse.

L'objectif de l'étude était donc de réanalyser l'ensemble des données relatives aux patients de l'étude STAR*D en respectant le protocole de recherche original. Les données de 4041 adultes dépistés positifs pour un trouble dépressif majeur ont été réanalysées.

L'une des premières critique des auteurs, est que - contrairement à la plupart des essais cliniques - STAR*D a recruté des patients en quête de soins (vs recrutés) et a inclus des patients présentant un large éventail de comorbidités médicales et psychiatriques. C'est à la fois une critique et un avantage, car cela peut également correspondre plus à la "vie réelle".


Mais la critique la plus importante c'est que les investigateurs de STAR*D n'ont pas utilisé l'échelle de Hamilton (score HDRS) prévu par le protocole pour rapporter les taux cumulés de rémission et de réponse dans leur article de synthèse, ils ont utilisé à la place une évaluation clinique non aveugle (!). Cela a gonflé leur rapport sur les résultats, tout comme l'inclusion de 99 patients qui avaient déjà obtenu un score de rémission au début de l'étude, ainsi que 125 qui avaient déjà obtenu un score de rémission alors qu'ils ont commencé leur traitement de niveau suivant.

Ces patients auraient dû être exclus de l'analyse des données et si ça avait été le cas, contrairement au taux de rémission cumulatif de 67% rapporté par STAR*D après un maximum de quatre essais de traitement antidépresseur, le taux passait à ... 35% si l'on utilisait le HDRS comme stipulé dans le protocole initial. Il devient ainsi évident que les conclusions initiales de l'étude sont biaisées et ne reflètent pas fidèlement la réalité clinique.


Finalement cette étude remet en question l'efficacité des traitements antidépresseurs en révélant des taux de rémission dépressive après quatre thérapies inférieures aux attentes, et surtout elle souligne l'importance de la présentation précise des données cliniques et met en évidence des différences significatives par rapport aux essais contrôlés conventionnels, remettant en question la généralisation de ces derniers aux soins de santé mentale en situation réelle.


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