Une transplantation de microbiote de patients souffrant d’Alzheimer entraine des symptômes de la maladie (modèle animal)

La relation entre le microbiote et le fonctionnement cérébral suscite un intérêt croissant. Depuis des décennies, l'attention s'était principalement portée sur les facteurs génétiques et moléculaires associés aux maladies neurodégénératives, cependant, l'émergence récente de preuves suggérant une corrélation entre microbiotes, symptômes cognitifs et neurogenèse hippocampique (le processus de formation de nouveaux neurones dans l'hippocampe, une région du cerveau impliquée dans la mémoire et l'apprentissage) soulève des questions fondamentales qui ne peuvent être ignorées.


Microbiote et cerveau



La complexité du microbiote ne peut être sous-estimée : ses rôles cruciaux dans la régulation du système immunitaire, la digestion des aliments et la production de vitamines sont bien établis. Cependant, les récentes découvertes suggèrent qu'il pourrait exercer une influence considérable sur des fonctions biologiques allant bien au-delà de la sphère gastro-intestinale.


Dans le contexte spécifique de la maladie d'Alzheimer, les déficits cognitifs et la détérioration de la neurogenèse hippocampique sont depuis longtemps au cœur des recherches et des préoccupations. Cette affection caractérisée par la perte progressive de la mémoire et des fonctions cognitives, a été étudiée sous différents angles, mettant en lumière divers processus cellulaires et moléculaires sous-jacents, mais l'exploration du lien potentiel entre le microbiote et ces altérations spécifiques représente une avancée novatrice et originale.


Une étude originale


Pour traiter cette question des équipes Irlandaises et Italiennes ont publié une étude dans Brain (IF 14.5 Rang A) en octobre 2023. 69 patients atteints de la maladie d'Alzheimer et 64 sujets témoins en bonne santé cognitive ont été recrutés à l'IRCCS Centro San Giovanni di Dio Fatebenefratelli, Brescia, Italie, pour participer à l'étude. Tous les participants ont subi une évaluation de leurs fonctions cognitives, un examen physique, ainsi que des bilans biologiques (sang et selles). Des analyses de l'expression des cytokines dans le plasma et une analyse de la composition du microbiote ont été réalisées. Mais surtout, ils ont tenté une expérience originale de transplantation fécale de microbiote humain sur des rats « sains » pour évaluer si cela modifiait leur comportement.

Adult rats colonized with faecal material from Alzheimer’s patients harbour different bacterial genera and display alterations in intestinal epithelial structure


Avec des résultats étonnants


Cette étude met d’abord en évidence plusieurs corrélations significatives entre la maladie d'Alzheimer et divers facteurs biologiques, comportementaux et cliniques.

1. Les patients atteints de la maladie d'Alzheimer ont présenté des niveaux élevés de plusieurs cytokines pro-inflammatoires : IL-1β, NLRP3, MIF et IL-10. En parallèle, une diminution significative de l'IL-4 a été observée.


2. Les altérations de la composition de la microbiote intestinale chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer sont marquées par :

- une augmentation de Bacteroidetes

- Une calprotectine fécale significativement augmentée

- Une diminution de Firmicutes et Verrucomicrobiota.


Des caractéristiques démographiques (un âge plus avancé, une prévalence plus élevée de porteurs de l'allèle ApoE4, un niveau d'éducation plus bas et un score MMSE logiquement réduit) ont été relevées chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer par rapport aux sujets témoins.


En ce qui concerne la neurogenèse, le sérum prélevé chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer montre une diminution significative de la capacité de prolifération des cellules progénitrices hippocampiques, tel qu'indiqué par une réduction de l'expression des marqueurs de la prolifération cellulaire tels que Ki67. De même, l'exposition de neurones sains au sérum des patients atteints de la maladie d'Alzheimer a entraîné une diminution significative de l'expression des marqueurs des neuroblastes et des neurones différenciés.


Concernant l’expérience de transplantation fécale de microbiotes de patients souffrant de maladie d’Alzheimer à des rats adultes en bonne santé, l’étude montre que cela à induit des symptômes cognitifs caractéristiques de la maladie d'Alzheimer, associés à une altération de la neurogenèse.


Par ailleurs, des altérations métaboliques significatives ont été observées dans le contenu caecal (zone de l’intestin) et les tissus hippocampiques des rats colonisés par le microbiote d'Alzheimer. Bien que les altérations aient été plus marquées dans le caecum, une diminution de la taurine dans l'hippocampe des rats colonisés par le microbiote d'Alzheimer a été observée. Étant donné le rôle de la taurine dans la prolifération et la survie des cellules progénitrices neurales de l'hippocampe, il est plausible que certains effets observés du microbiote d'Alzheimer sur la neurogenèse soient partiellement médiés par la taurine.


Conclusion


Tous ces indices (arrêt des capacités de neurogénèse de cellules saines en cas de présence de sérum de patient malades, induction de symptômes cognitifs chez les rats transplantés du microbiote de sujets malades) pointent vers le fait que la neurogenèse de l'hippocampe est un processus cellulaire régulé par des facteurs circulatoires systémiques à médiation intestinale dans la maladie d'Alzheimer.


Ainsi, ces résultats confirment que la maladie d'Alzheimer est caractérisée par une inflammation systémique et intestinale, et que les altérations de la composition du microbiote intestinal chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer précipitent des symptômes associés à la maladie.

Dans peu de temps des interventions spécifiques, soit préventives, soit stabilisatrices, permettront sans doute de mettre à profit ce type de résultat : agir sur le microbiote est déjà un impératif en psychiatrie, cela va bientôt le devenir également en neurologie.

En France, l'étude MICMALZ, menée à Montpellier, vise à valider une différence de signature microbienne sanguine entre les patients atteints de la maladie d'Alzheimer et les sujets témoins, afin de proposer des stratégies innovantes potentielles.

Par ailleurs 48 études recrutent actuellement sur Cline pour mieux comprendre et traiter la maldie d'Alzheimer.




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