Qu'est-ce que la Sclérose en Plaque ?

La SEP est une maladie chronique du système nerveux central, affectant plus de 2,5 millions de personnes à travers le monde. Son nom peut sembler technique et lointain, mais pour ceux qui en sont atteints, il représente un quotidien fait de défis, d'incertitudes, mais - grâce à la recherche médicale - aussi d'espoir.

Une énigme médicale


La nature regorge de mystères que l'humanité n'a de cesse de vouloir résoudre. Certaines énigmes sont proches de nous, nichées au cœur même de notre propre corps. Parmi elles se trouve la sclérose en plaques, communément appelée SEP.

Imaginons que nos nerfs soient comme des autoroutes où les voitures (l'information) roulent très vite. Sur cette autoroute, le sol est revêtu d'une protection appelée myéline, qui ressemble à de la gaine isolante autour des câbles électriques. C'est grâce à cette gaine que les voitures peuvent filer à toute vitesse. Dans la SEP, des cellules attaquent cette gaine, provoquant des embouteillages, ou même, des routes barrées ! Résultat : l'information circule mal.


Autrement dit, lorsque cette myéline est endommagée, la communication entre les différentes parties du corps peut être perturbée, voire interrompue. Imaginez un instant une autoroute sur laquelle un accident se produit. Le trafic est ralenti, voire arrêté, les voitures ne peuvent plus avancer, et tout le système est perturbé. C'est un peu ce qui se passe dans le corps d'une personne atteinte de SEP. Les symptômes peuvent varier d'une personne à l'autre, allant de la fatigue à des troubles de la vision, en passant par des problèmes de mobilité.


Malgré les avancées de la médecine, la SEP reste un mystère. Sa cause exacte n'est pas encore totalement connue (comme c'est d'ailleurs le cas pour de nombreuses maladies auto-immunes : pourquoi notre système immunitaire décide un jour de s'en prendre à lui même ?) même si des facteurs génétiques, environnementaux ou infectieux sont souvent évoqués. Les traitements actuels visent à atténuer les symptômes et à ralentir la progression de la maladie, mais ils ne peuvent pas encore la guérir totalement.

Petit retour en arrière


Bien qu’elle soit mieux comprise aujourd'hui grâce aux technologies modernes et aux avancées de la recherche médicale, ses premières descriptions remontent à plusieurs centaines d'années.


Une première description au XIIème siècle


Les premières descriptions qui évoquent une maladie ressemblant à la SEP datent du XIIème siècle, avec la description de symptômes neurologiques chez une jeune islandaise (Halla la Viking) ce qui à même conduit un célèbre neurologue américain, le Dr. Poser, à proposer dans les années 90 la théorie « Viking » de la SEP, expliquant que la maladie serait peut-être même apparue avant le XIIe en Scandinavie et se serait ensuite répandue au fur et à mesure des invasions et des conquêtes des Vikings ! Il s'agit donc d'une théorie qui donne une place prépondérante à la génétique, mais qui n'est pas formellement démontrée pour le moment même s'il existerait une certaine corrélation entre le nombre de cas de SEP et les zones d'installation des vikings.


Une description plus précise concerne le cas d'Augustus d'Este, un descendant lointain de la royauté britannique, qui a tenu un journal détaillé de ses symptômes de 1822 à 1848. Bien qu'il n'ait jamais été diagnostiqué de son vivant, ses écrits sont si évocateurs que les historiens de la médecine le considèrent comme l'un des premiers cas réellement documentés de SEP.


Une formalisation au XIXème siècle


C'est au XIXème siècle que la maladie commence véritablement à être distinguée. Le neurologue français Jean-Martin Charcot, souvent surnommé le "père de la neurologie", a été le premier à identifier et à décrire la SEP en tant que maladie distincte en 1868. En étudiant le cerveau d’une patiente décédée ayant présenté des symptômes typiques de la SEP, Charcot a remarqué des plaques caractéristiques dans le tissu cérébral. Ces lésions, aujourd'hui bien connues comme étant symptomatiques de la SEP, lui ont donné son nom.


Jusque dans les années 20 les élèves de Charcot évoquent une origine bactérienne à cette maladie et de nombreux travaux vont être menés pour débusquer le "coupable" sans succès. Puis c'est la théorie d’une origine vasculaire qui va progressivement prendre le pas sur la théorie infectieuse. Dans cette théorie, les lésions seraient provoquées par des troubles veineux.

Enfin, c’est le modèle auto-immun qui est mis en avant : la SEP serait liée à une réaction immunitaire avec des anticorps orientés contre les gaines de myélines (à la fois dans le cerveau et au niveau médullaire).

Des avancées majeures au XXème siècle


Le XXème siècle a été une période d'énormes progrès pour la compréhension et le traitement de la SEP. Dans les années 60 certains ont essayé de concilier le modèle auto-immun et le modèle infectieux en imaginant que ça serait l'auto-immunité consécutive à l’infection par un virus qui serait à l'origine de la SEP, comme une "réaction croisée" avec des anticorps orientés contre le virus qui s'attaqueraient aussi aux gaines de myélines. C'est sur ce type de théorie mixte (auto-immune / infectieuse) que sont venu se greffer plusieurs de théorie en lien avec une aggravation vaccinale de la maladie (voir infra).

Dans les années 1960 et 1970, les chercheurs ont commencé à développer les premières thérapies pour traiter la SEP. Il s'agissait principalement de médicaments immunosuppresseurs pour tenter de moduler l'activité du système immunitaire, puisqu'il était de plus en plus clair que la SEP était une maladie auto-immune.

Enfin l'arrivée de l'imagerie par résonance magnétique (IRM) dans les années 1980 a été une véritable révolution. Pour la première fois, les médecins pouvaient "voir" la maladie en action dans le cerveau vivant, permettant des diagnostics plus précoces et précis.


Le XXIème siècle : L'Ère de la Personnalisation


Avec l'arrivée du 21ème siècle, les avancées en génétique et en biologie moléculaire ont ouvert la porte à une meilleure compréhension des causes sous-jacentes de la SEP. Ces progrès ont également conduit au développement de thérapies ciblées, permettant de traiter les patients de manière plus spécifique et individualisée.


Désormais, au lieu de se contenter de traiter les symptômes, les chercheurs peuvent s'attaquer aux mécanismes moléculaires précis qui déclenchent la maladie. C'est une période passionnante pour la recherche sur la SEP, car chaque découverte nous rapproche d'un remède potentiel.

La trajectoire de la recherche sur la SEP est un témoignage de la ténacité et de la persévérance de la communauté scientifique. De l'identification initiale de la maladie par Charcot à nos approches modernes axées sur la génétique, chaque décennie a apporté son lot de découvertes et d'espoir.

Quels sont les symptômes de la SEP ?


Cette atteinte provoque une perturbation ou une interruption de la transmission des signaux nerveux, donnant lieu à divers symptômes.


1. Symptômes sensoriels


Paresthésies : Les patients atteints de SEP peuvent ressentir des fourmillements, des picotements ou des sensations de brûlure dans différentes parties de leur corps.


Douleurs neuropathiques : Certaines personnes ressentent des douleurs qui ressemblent à des sensations de brûlure, généralement dans les jambes.


Perturbations de la vision : L'une des premières manifestations de la SEP est parfois une névrite optique, qui se caractérise par une perte de la vision d'un œil, associée à de la douleur lors du mouvement de l'œil.


2. Symptômes moteurs


Faiblesse musculaire : Elle peut toucher un ou plusieurs membres, entravant la mobilité.


Spasticité : Les muscles peuvent devenir raides et résistants au mouvement, entraînant des douleurs et des spasmes.


Tremblements : Certains patients peuvent éprouver des tremblements dans leurs membres ou leur tronc.


Difficultés à marcher : Les problèmes d'équilibre, la faiblesse musculaire et la spasticité peuvent rendre la marche difficile.


3. Symptômes cognitifs et émotionnels


Troubles cognitifs : La SEP peut affecter la mémoire, la concentration, la capacité à planifier ou à exécuter des tâches.


Dépression : De nombreux patients souffrent de dépression, liée soit à la maladie elle-même (à cause de l'inflammation cérébrale), soit à la difficulté d'accepter leur diagnostic et leurs altérations fonctionnelles.


Anxiété : L'incertitude concernant l'évolution de la maladie peut être source d'anxiété pour de nombreux patients.


4. Symptômes liés au système nerveux autonome et autres symptômes


Troubles vésicaux : Les patients peuvent avoir du mal à retenir leur urine ou à la vider complètement.


Troubles intestinaux : La constipation est courante, tout comme la difficulté à contrôler les mouvements intestinaux.


Dysfonction sexuelle : La SEP peut affecter la libido, ainsi que la capacité d'avoir une érection ou d'atteindre l'orgasme.


Fatigue : La fatigue est l'un des symptômes les plus courants et les plus invalidants de la SEP. Elle peut être disproportionnée par rapport au niveau d'activité et n'est souvent pas soulagée par le repos.


Troubles de l'équilibre : Les patients peuvent se sentir étourdis ou avoir le vertige, ce qui augmente le risque de chute.


Problèmes d'audition : Bien que rare, certains patients peuvent ressentir une baisse de l'audition ou des acouphènes.


Traitements, innovations et recherche


Les médicaments modificateurs de la maladie (DMD) sont au cœur de la stratégie thérapeutique de la SEP. Ces médicaments cherchent à réduire la fréquence et la gravité des poussées, ralentir la progression de la maladie et améliorer la qualité de vie. En voici quelques exemples :


Les interférons bêta : Bien que disponibles depuis les années 1990, les interférons bêta continuent d'évoluer. Ils agissent en modulant la réponse immunitaire, réduisant ainsi l'inflammation dans le système nerveux central.


Le glatiramère (Copaxone) : C'est un autre immunomodulateur, qui fonctionne en bloquant l'activation des cellules T, responsables de l'attaque de la gaine de myéline des neurones.


Le fingolimod (Gilenya) : Il agit en piégeant certaines cellules immunitaires dans les ganglions lymphatiques, empêchant leur entrée dans le cerveau et la moelle épinière.


Le teriflunomide (Aubagio) : Il inhibe une enzyme nécessaire à la multiplication des lymphocytes, réduisant ainsi leur nombre.


Le diméthylfumarate (Tecfidera) : Il agit en interférant avec les voies inflammatoires et oxydatives impliquées dans la SEP.


Récemment, l'importance des cellules B dans la pathogenèse de la SEP a été reconnue. Cela a conduit au développement de médicaments ciblant spécifiquement ces cellules :


L'ocrelizumab (Ocrevus) : C'est un anticorps monoclonal qui cible les cellules B CD20+ et les détruit. Il a montré une efficacité remarquable dans les essais cliniques, à la fois pour la forme récurrente-rémittente et la forme progressive primaire de la SEP.


Le rituximab : Bien qu'initialement développé pour traiter certains types de cancer, il cible également les cellules B et a montré des effets bénéfiques dans la SEP.


Les thérapies régénératives, répondent à l'un des défis majeurs de la SEP qu'est la dégénérescence neuronale. Les approches régénératives cherchent à réparer ou remplacer les tissus endommagés :


Cellules souches : Les traitements à base de cellules souches, comme l'HSCT (transplantation autologue de cellules souches hématopoïétiques), ont montré des promesses dans la réparation des dommages neurologiques. L'HSCT vise à "réinitialiser" le système immunitaire en remplaçant les cellules immunitaires pathogènes.


Promoteur de la remyélinisation : Des médicaments comme l'opicinumab cherchent à stimuler la remyélinisation, réparant ainsi la gaine de myéline autour des neurones.


Certaines innovations technologiques permettent également d'apporter certains espoirs. C'est par exemple le cas de certaines techniques de neurostimulation.


Enfin la recherche clinique permet d'accéder à des traitements innovants, avec environ une cinquantaine d'études interventionnelles en cours en France en 2023.

Conclusion


Le traitement de la SEP a parcouru un long chemin au cours des dernières décennies. Des modulateurs immunitaires aux traitements oraux en passant par les thérapies ciblées et régénératives, les options thérapeutiques pour les patients SEP n'ont jamais été aussi nombreuses. Avec l'essor de la recherche et de l'innovation, l'avenir de la prise en charge de la SEP semble prometteur.

Si le passé nous a enseigné une chose, c'est que la persévérance et le soutien constant à la recherche peuvent changer le cours de la maladie pour de nombreuses personnes. En investissant dans la recherche, en soutenant les scientifiques et en éduquant le public, nous pourrons écrire le prochain chapitre de cette histoire, dans l'espoir d'un monde sans SEP.

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